Mokhallad Rasem raconte une histoire intemporelle sur l’abandon de son monde ancien, pétri de souvenirs familiers et d’habitudes, pour un environnement nouveau. Un homme et un enfant de cinq ans aboutissent au bout d’un long périple entamé de l’autre côté de l’océan dans un centre d’hébergement pour demandeurs d’asile où ils reçoivent des titres de séjour et de nouveaux noms. Le passé devient un souvenir vague et lointain. D’après le roman du Prix Nobel de Littérature J.M. Coetzee.
Que ressent-on quand on abandonne son monde familier d’antan – pétri de souvenirs et d’habitudes – à un nouvel environnement ? Que ressent-on quand on vit une vie à laquelle rien ne fait défaut, une vie nettoyée de souvenirs, dénuée de désirs inavoués et d’aspirations secrètes ? Est-ce possible ? Souhaitable ? Ces questions constituent l’essentiel du roman récent de l’écrivain sud-africain Prix Nobel de Littérature J.M. Coetzee, <em>Une enfance de Jésus</em>, que Mokhallad Rasem a pris pour point de départ de son nouveau spectacle et a adapté à la scène. Il en fait une pièce de théâtre animée pour deux hommes, deux femmes et un enfant.
Un homme – d’un âge indéterminé – et un petit garçon âgé de cinq ans arrivent, après un long périple entrepris de l’autre côté de l’océan, dans un centre d’hébergement où ils reçoivent des titres de séjour et un nouveau nom, l’homme s’appellera désormais « Simon », le garçonnet, « David ». Outre le fait de devoir se débrouiller en espagnol, rien n’indique avec précision le lieu où ils se trouvent. Le passé est un souvenir lointain. Ils sont de nouveaux arrivants, déplacés dans un environnement étranger. Pendant le voyage, le petit David a perdu sa mère. Pris de pitié pour lui, Simon l’a recueilli, comme une sorte de tuteur ou d’accompagnateur. Simon cherche un gîte et trouve du travail, mais son objectif principal est de trouver une mère – sa mère – pour David.
À certains égards, l’environnement dans lequel Simon et David atterrissent est très reconnaissable : on y travaille, il y a des magasins, des maisons, des voitures qui roulent, on y joue au tennis, il y a des écoles et des centres culturels. Néanmoins, tous ces éléments familiers baignent dans une atmosphère irréelle et étrange. Les habitants entretiennent des rapports pacifiques, sans attentes ou convoitises apparentes, dans une sorte de société égalitaire qui frappe sans cesse Simon de stupéfaction. Avec beaucoup de patience on explique à ce personnage exotique, encore sous l’emprise d’un mode de penser archaïque et d’une sensibilité désuète, comment fonctionne le nouveau monde. S’adapter à un nouvel environnement et quand même conserver son identité se révèle un exercice difficile, si difficile même qu’Inès, la mère qu’on a « trouvée » pour le jeune David voudra soustraire cet enfant hautement particulier à cette nouvelle société.
Simon, Inès et David prennent la fuite ensemble…
Ludo Teeuwen, fin connaisseur de Coetzee, écrivait : « Ce roman semble être un testament, l’adieu d’un vieux monde fatigué qui doit céder la place au monde libérateur de l’enfant. » Abandonner ce qui est révolu, et vouloir, ou devoir, embrasser la nouveauté, sans se perdre, n’est-ce pas la condition existentielle de bon nombre dans notre société ? Ou de chacun d’entre nous à tout bout de champ ? Il est grand temps que le créateur de la Toneelhuis nous éclaire de sa lumière sur la question.
texte
- J.M. Coetzee
adaptation
- Guy Cassiers
- Mokhallad Rasem
dramaturgie
- Erwin Jans
interprétation
- Sabri Saad El Hamus
- Yamina Takkatz
- Mieke De Groote
- Filip Jordens
- Mokhallad Rasem
scénographie
- Mokhallad Rasem
musique
- Bassem Hawar
- Free Desmyter
composition
- Free Desmyter
editeur
- Uitgeverij Cossee
production
- Toneelhuis