Oresteia, un début…

Le 28 juin, à Besançon, on a pu voir un moment de présentation publique des prémices qu’a portées le workshop international de dix jours autour de l’Oresteia d’Eschyle. Mokhallad Rasem était l’un des metteurs en scène invités à s’attaquer à ce matériau, et sa moisson a été pour le moins surprenante.

Basée à Paris, la SIWA PLATEFORME – laboratoire artistique itinérant des mondes arabes contemporains – a invité trois metteurs en scène à se pencher sur l’Oresteia d’Eschyle. Le but est de travailler en étapes, avec des workshops plus ou moins longs qui aboutissent sur des moments de présentation publique : à leur tour, ceux-ci mèneront à terme à une présentation finale. Le 28 juin était le premier de ces moments de présentation publique.

Le metteur en scène et acteur irakien Haythem Abderrazk s’est concentré sur le volet Agamemnon de la trilogie. Célie Pauthe, metteuse en scène et directrice artistique du Centre National Dramatique de Besançon s’est focalisée sur le deuxième volet, Les Choéphores. Mokhallad Rasem a pris à son compte le troisième, Les Euménides.

Pendant dix jours, deux acteurs français, trois acteurs/actrices irakiennes, deux musiciens irakiens et deux interprètes ont répété dans un studio de Besançon.

De pair avec tous les acteurs et musiciens, Haythem et Célie ont exploré quelques scènes cruciales des volets un et deux de la trilogie dans laquelle le cycle du meurtre et de la vengeance, imposés par les dieux, est finalement interrompu par l’instauration d’un tribunal de citoyens.

Mokhallad, lui, s’avère avoir totalement changé de cap : au lieu de mettre lui aussi un volet en scène, il a conduit pendant ces dix jours et avec tous les participants des entretiens détaillés qu’il a enregistrés sur vidéo : quelle est la place de la violence et de la vengeance dans la société ? Est-il possible de les surmonter, de les éviter ? Quelles sont les causes de cette violence ?... 

Quand l’Oresteia porte sur l’arrêt du devoir de vengeance imposé par les dieux, annonçant ainsi l’ère du l’État de droit, les questions de Mokhallad orientent ce thème vers le présent. Ce montage des interviews s’avère être un document passionnant avec des opinions nuancées sur la violence qui se déchaîne partout, en Europe et ailleurs, en passant par le contexte irakien (le passage d’une dictature au chaos actuel), le rappel des mécanismes du marché global qui sont peut-être une variante des dieux intransigeants, pour en arriver aux réponses très personnelles à propos des dilemmes qui se posent aux personnages de l’Oresteia. La dramaturgie du projet se révèle soudain en images, et donne d’emblée une vision profonde des motifs et de la portée du projet, non seulement pour les spectateurs présents, mais aussi pour les acteurs et les créateurs qui voient leurs réponses reflétées et complétées par celles des autres participants…

À suivre, sans doute aucun.