Interview avec Abke Haring et Benjamin Verdonck sur Song#2

SONG#2 est une œuvre poétique de science-fiction qui met en scène l’humanité en l’an 4000.
Elle parle de splendeur passée, de paysages industriels, de monstres d’acier…
Et du destin, de la corrélation, de la vision, de l’auréole de misère qui nimbe le tout…
La forêt et l’enfant
dont il ne restera rien
/
un souvenir

Pourquoi ce titre ?

Abke : Song#2 doit se lire comme « chanson pour deux ».

Pourquoi une chanson ?

Abke : Une chanson a une structure solide, j’aime cela.

Vous savez chanter ?

Abke : Non.

Benjamin : J’aime bien chanter.

Pourquoi souhaitez-vous travailler avec Abke ?

Benjamin : Je l’ai interviewée pour Toneelg(e)ruis. Et ses réponses m’ont époustouflé.

Qu’as-tu retenu de cette conversation ?

Benjamin : Je lui ai demandé quel était son auteur préféré. Elle a soupiré, puis a répondu : « Je lis des livres de photos. »

Abke : Je reste accrochée à une page parce que je veux en comprendre les détails. Mais je continue à essayer. Je trouve que bien savoir lire est l’une des plus belles choses qui soient.

Pourquoi souhaites-tu travailler avec Benjamin ?

Abke : Il explique bien les choses.

Benjamin : Pendant les répétitions d'Au beau milieu de la nuit, j'ai rencontré Abke à nouveau. Son humour m'a rappelé l’époque à laquelle je répétais avec Dood Paard à Amsterdam. J’ai beaucoup ri pendant cette période.

On s’attend à assister dans ce spectacle à une rencontre entre deux créateurs totalement différents.

Tous deux : Ce n’est pas une rencontre.

Benjamin : C’est toujours une rencontre. Nous faisons une représentation ensemble. Comme on le fait toujours.

Abke : Benjamin s’adresse souvent directement à son public, littéralement. Je crée une ambiance, un état, que je présente à mon public. Je voudrais entendre la sonorité de mes mots prononcés par Benjamin.

Commencerez-vous par le texte ?

Benjamin : Nous n’en avons pas convenu ainsi.

Abke : J’ai besoin de temps pour l’écriture. Donc peut-être Benjamin sera-t-il le premier à apporter quelque chose.

Benjamin : Je n’exclus pas d'écrire aussi quelque chose. Bien que je ne le sache jamais à l’avance

J’écris par la grâce du moment. Cela marche ou ne marche pas.

Abke : Une réponse très vague.

Serez-vous tous deux sur scène ?

Abke : Pour l’instant oui, mais Benjamin voulait conserver la possibilité d'un troisième acteur.

Benjamin : Une chose, une chose-acteur, un objet-humain, une poupée de chiffon.

Abke : Pas un homme.

Benjamin : Je savais que tu dirais cela. Pas un homme, non. Tu amènes déjà Senjan avec toi.

Senjan Jansen assure la conception sonore. D’autres partenaires de scène ?

Benjamin : Iwan Van Vlierberghe qui s’occupe de la coordination technique de mon travail depuis plusieurs années.

A-t-il également une influence artistique ?

Benjamin : Naturellement.

Mais quelle idée dois-je me faire de votre nouvelle production ? Puis-je vous demander de quel sujet traitera le spectacle ?

Tous deux : Bien sûr.

Abke : Benjamin, tu m'as parlé cette nuit d’une image que tu avais imaginée.

Benjamin : Je t’ai parlé du paysage ?

Abke : Le paysage ? C'était quelque chose avec les saisons.

Benjamin : C’est une multitude de montagnes avec quelques maisonnettes derrière lesquelles le soleil brille, la lune. Où il vente, pleut, neige, bourgeonne, fleurit et gèle à pierre fendre.

Abke : Les saisons, les quatre saisons.

Benjamin : Je voyais quelque chose de ce genre se dérouler derrière nous tout au long de la représentation. Simplement le fait que ces saisons soient présentes.

Abke : J’entends une langue que les gens utilisent en 3015 lorsqu’ils parlent de maintenant.

Benjamin : Tu vois, c’est ce que je veux dire.

Si je devais décrire votre spectacle en une seule phrase ?

Abke : C’est un supplice de Tantale.

Benjamin : Un rocher de Sisyphe.

Benjamin : Aftje Haring et Benjamin Verdonck créent Song#2, un spectacle méticuleux.

Abke : Appje, c’est appje.

Benjamin : Cela promet d’être très triste. Un chant du cygne. Je voudrais commencer avec Money for Nothing des Dire Straits et réduire ensuite tout le décor en miettes.

Abke : Une convection.

Benjamin : Laisse tomber.

Avez-vous beaucoup en commun ?

Abke : Je me reconnais dans le méticuleux.

De quelle manière ?

Benjamin : Être méticuleux, c’est s’occuper de… C’est du dévouement. C’est quelque chose de chaleureux.

Abke : Chaleureux ? Méticuleux signifie extirper le cœur d'un animal mourant. Cela parle de tranchant, de couteaux, d’excision de la douleur et du fait de montrer cela.

Benjamin : C’est ce que je veux dire.

Abke : Pour moi, méticuleux revient à exprimer très précisément la blessure par des mots.

Benjamin : Méticuleux comme dans « s’occuper de ».

Abke : ... comme dans « achever » …

 

 

interview de An-Marie Lambrechts

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